Les Maîtres de forges s’interpellaient entre eux par le nom de « Cousin du Foisil ».

Nombreux ont été les Maîtres de Forges à Longny  mais il n’est pas rare de constater qu’ils ne restaient, parfois,  en place qu’une ou deux années.

Les deux Honorables Maîtres que nous avons retenus  de la liste en notre possession et pour lesquels nombres importants de documents sont restés en archives sont les deux NICOLAS.

Le premier, Nicolas LANGLOIS dont une pièce du 14 Septembre 1635 paraît être une transaction intervenue au cours d’un procès survenu à la suite de troubles subis par le maître de forges dans la jouissance des bois de la Baronnie de Longny.

On  trouve le nom de « l’Honorable homme Nicolas Langlois » Maître des grosses forges de Longny et du Fourneau de Rainville, selon le bail à lui fait par Marc Monhay, bailli du Baron Claude Charlot, conseiller, notaire et secrétaire  du Roi. Nicolas LANGLOIS  eu quelques difficultés avec la Baronnie de Longny mais il fut l’un des derniers Maîtres de Forges qui ait œuvré au développement de  son industrie avant la fermeture de celle-ci par la Baronne Barbe de Servien.

Il y eu bien d’autres maîtres de forges après lui mais il apparaît, dans les restes d’archives, que Nicolas LANGLOIS  a montré une grande pugnacité dans la gestion de ses affaires.

Le deuxième Nicolas est Nicolas LE REDDE dont nous parlerons, quelques lignes après, dans ce texte.

Quand Dame  Barbe de Servien,  veuve de Pierre de Gruel, dame de la Frette, devint Baronne de Longny en 1667,  elle refusa de continuer à la demoiselle DUMANS (veuve de Jean Baptiste de Lion Sieur de la Réalle fermier des Forges et Fourneau de la Baronnie de Longny)  le bail des forges, fourneau et exploitation des bois de Longny, consenti par Anne Aymeret veuve de claude CHARLOT. Elle  décida la  transformation de  la Forge de Beaumont en moulin à Papier ;  son idée était de faire cesser la concurrence avec la forge de la Frette dont elle était propriétaire (cet acte signifie ici qu’il s’agit bien de Baronnies Industrielles).

Un long procès, intenté par la demoiselle Dumans à la Baronne de Longny pour non exécution du bail,  se conclut par une transaction devant la cour des Aides à Paris le  6 Mai 1668  et Dame Barbe de Servien consentit l’acquisition, moyennant la somme de  1.000 livres  du petit bief de Beaumont acquis récemment des Sieurs de la Hellière et de la petite Noë  (acte du 20 Juillet 1650).


LA FABRICATION  DU FER CESSA PENDANT PLUS DE QUARANTE ANNEES  A LONGNY. (1667 à 1708)

Ce fut une grande misère qui s’abattit sur notre village car c’était  environ 300 personnes qui travaillaient pour la Forge ,( tireurs de mines , charbonniers , rouliers , forgerons , affineurs ,marteleurs  etc ..)  

Les familles furent cruellement touchées par cette cessation d’activité.

C’est en 1705 (le 26 Mars 1705) que  Monsieur Antoine Crozat afferma en bloc ses domaines de Longny, Argentan, Exmes et Trun à Nicolas le REDDE  noble marchand demeurant à Nonancourt pour un loyer global de 20.600 livres. Sur  cette somme, la terre de Longny,  à elle seule,  représentait 12.600 livres ; à une transaction du 4 Avril suivant s’ajoute un document sur lequel est précisé que le Sieur Nicolas le REDDE « pour employer le produit  de ses coupes de bois de la Baronnie »  qui s’étendaient annuellement sur cent arpents s’engage à faire construire, sur ses deniers, une grosse forge complète comprenant deux affineries, fourneau, fenderie ; etc.  en lieu et place du moulin à papier de Beaumont qu’il ferait réédifier ailleurs.

Nature du bail :

Par devant Pierre Aveline et Mathieu Delamotte, Bailly, condé du Roy, notaire au Chatelet de Paris sous signé que fut présent Mr Antoine Crozat écuyer du Roy seigneur de Blainville, seigneur de Chatel, Mouy, et Vaudeuil, Receveur Général des finances de Bordeaux agissant comme procureur de S.A. de Duc de Vendôme Fondé de Procuration général.


Il devra laisser ladite forge en bon état, bien tournante, vivante, et faisant le fer dont sera dressé le procès-verbal, à l’exception des soufflets, enclumes et marteaux, pinces et autres ustensiles que le sieur Le REDDE pourra emporter suivant l’usage. Pour la jouissance des Mines, castines en bois de la Baronnie le sieur Le REDDE s’oblige à payer un supplément de loyer de 3600 livres,

Par contre,  le bail de 9 ans ne débutera, lui,  qu’en 1708,  et ce quand les forges seront reconstruites.  Il sera renouvelé pour 9 ans de 1717 à 1726, même si, pendant ce laps de temps,  la terre de Longny venait  à changer de propriétaires ;  en outre,  le maître de forges aura le droit de faire pâturer ses chevaux dans tous les bois du domaine , sauf sur  les ventes de moins de 2 ans et les droits domaniaux sur la fonte et sur le fer seront à la charge du bailleur.

Ce bail fut repris par Emmanuel Desprez  sieur de Brétigny, caution de Nicolas le REDDE à la mort de celui-ci, cette même famille resta à la tête des forges pendant plus de quarante années.

Emmanuel DESPREZ ne trouva point à son goût le logis du Maître de forges de Rainville  et souhaita faire construire, pour se loger,  un plus grand et beau bâtiment ce qu’il fît à Beaumont ; cette belle demeure que l’on connaît encore de nos jours et que les Longnyciens ont baptisée le château de la Forge.

En attendant que le bâtiment fût terminé,  le Baron laissa jouissance d’une partie de son château afin que le Maître de forge y habitât.

Les difficultés et différends ne manquaient pas et nous ne citerons, pour mémoire,  que trois des principaux procès (qui font le bonheur des historiens car il reste un fond d’archives).

Un premier procès eu lieu,  à la demande de Pierre Gagnat,  qui reprochait à son Maître de Forges  d’épuiser ses bois par des coupes trop fréquentes (ce procès vint devant la table de Marbre le 18 juin 1721).

Le deuxième intervint  parce que  le Seigneur de Longny voulait interdire aux attelages d’emprunter le chemin qui menait de Rainville  à Beaumont en passant par la Barre car les charrois, transportant de lourdes gueuses de Fonte,  détérioraient tous les chemins qu’ils empruntaient.

Et, en dernier lieu, un procès en 1721 par lequel le Baron de Longny demandait, d’une part, la démolition du Bocard du moulin de Rainville qui souillait l’eau de la Rivière et faisait mourir ses poissons dans son étang du château, ainsi que la destruction des maisons  au lieu dit « Les Loges »édifiées par les « tireurs de fer » dans les bois de la Baronnie.

Il voulait aussi  que  le sieur DESPREZ remette en état le moulin à tan, transformé en fenderie,  et qu’il reconstruise, à ses frais, la métairie de la Thibaudière  autrefois située près de la forge.

Querelles surprenantes lorsque l’on sait que le principal bénéficiaire des Forges était le Baron mais peut être aussi jalousie de savoir que le Maître de forges avait de « main de maître » rentabilisé l’usine au maximum.

C’est en 1730,  comme nous l’avons vu précédemment, que le Baron Pierre Gagnat achetât le moulin à tan qui deviendrait « la fenderie ».

Avec ces quelques lignes nous voulions vous  démontrer que les Forges à Longny étaient  une industrie importante et la position de Maître de forges  conséquente.  Certes,  les premiers Maîtres  de forges ou les premiers « Férons » n’ont pas eu partie facile et se retrouvaient bien  souvent  devant des  réalités de gestion qui ne simplifiaient pas leur tâche. Avec les « deux Nicolas »,   nous mettons le doigt sur ces difficultés. Elles ont été le quotidien de chacun de nos véritables « Patrons de l'usine à ‘faire le Fer’  de Longny ».




La Grosse forge de Beaumont à Longny



Le Moulin de Rainville 61290 Longny au Perche - Tél. 02 33 83 74 91 - courriel : le.moulin.rainville@orange.fr